“Après un mois, nous verrons.” Le ministre de la Santé Olivier Véran a laissé entendre sur franceinfo, que le nouvel enfermement qui débute vendredi 30 octobre pourrait durer plus d’un mois. Un premier point d’étape sera observé dans deux semaines “pour voir si d’autres décisions devraient être prises si la situation empire”, il a dit. L’objectif du gouvernement est de passer de 40 000 cas de contamination par jour à 5 000 en quatre semaines, un objectif inatteignable pour certains scientifiques.
“Au 1er décembre, nous ne serons pas à 5 000 contaminations par jour, je peux vous le dire tout de suite aujourd’hui. Cela prendra plus de temps”, a rétorqué le président du Conseil scientifique Jean-François Delfraissy, sur France Inter. Tous les indicateurs de l’épidémie continuent de se dégrader en France. Au 29 octobre, les courbes de réanimation, d’hospitalisations et de décès hospitaliers sont toutes à la hausse. La situation sanitaire est plus grave que lors du premier accouchement au printemps. Franceinfo détaille les raisons qui suggèrent que la séquestration pourrait se poursuivre au-delà du 1er décembre.
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Parce que le virus continue de circuler dans tout le pays
“Nous sommes dans une situation moins favorable que celle que nous avions au début du mois de mars. (…) La contamination est sur l’ensemble du territoire, et pas seulement dans certaines régions “comme au printemps, a prévenu Jean-François Delfraissy. A l’exception de la Guyane, tous les départements français ont atteint un seuil d’alerte (y compris 54 en alerte maximale et 39 en alerte améliorée), selon taux d’incidence pour l’ensemble de la population, taux d’incidence pour les personnes de plus de 65 ans, taux d’occupation des unités de soins intensifs.
Cependant, les personnes non testées, qui peuvent être positives et asymptomatiques, ne sont pas prises en compte ici. L’indicateur de personnes infectées est donc certainement largement sous-estimé. Il y a “probablement environ 1 million de Français potentiellement transmetteurs du virus”, Olivier Véran a déclaré jeudi sur franceinfo. “Nous ne pouvons pas exclure le fait que le virus continue de circuler. Nous ne pouvons pas exclure le fait qu’il y ait une troisième vague derrière.”
«En France, le virus est doublé tous les 10 à 14 jours. (…) On avait hier [mercredi 28 octobre] 36% de cas de plus que le mercredi précédent.
Olivier Véran, ministre de la Santésur franceinfo
Notre carte du rythme de progression du Covid-19 en Europe montre également que le nombre de nouveaux cas double toutes les deux semaines. “Aujourd’hui, la progression du virus est telle que nous ne pouvons plus suivre. Les contaminations augmentent à un rythme exponentiel”, note Renaud Piarroux, chef du service de parasitologie de la Pitié-Salpêtrière, avec franceinfo. “Alors que le virus circule de plus en plus, nous pouvons nous demander à quelle vitesse il va baisser et s’il va baisser à la même vitesse que ce que nous avons vu en mars-avril”, Dominique Costagliola, épidémiologiste à l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique, a déclaré à l’AFP.
Parce que les restrictions sont plus flexibles
LCe confinement ne permet pas d’arrêter complètement les transmissions. “Les gens ne sont pas confinés seuls, il y a donc des contaminations intra-familiales”, expliquait sur franceinfo la virologue Astrid Vabret au printemps. De plus, les restrictions sanitaires de ce nouveau confinement ont été assouplies par rapport au premier. Les crèches, écoles, collèges et lycées peuvent rester ouverts, tout comme les parcs et jardins. Les usines et les entreprises de travaux publics continueront de fonctionner, tout comme les comptoirs de service public. Même si un protocole sanitaire est prévu dans chacun de ces lieux, la transmission reste possible.
“Que fait-on à la cantine et dans l’éducation physique et sportive? A ces moments-là, les gens n’ont pas de masque et ils parlent, donc ce sont des opportunités de contamination.”
Dominique Costagliola, épidémiologisteà l’AFP
Le confinement ralentit donc la propagation du virus mais ne garantit pas qu’il s’arrêtera. Ses résultats dépendent également beaucoup du comportement individuel. “Le bon réflexe est que chacun se considère soit comme une personne vulnérable, soit comme une personne infectée: en prenant le plus de précautions possibles et en respectant constamment les gestes de barrière”, rappelle l’épidémiologiste Pascal Crépey à 20 minutes.
Parce que les hôpitaux sont saturés
Au 29 octobre, il y avait 3 156 patients en soins intensifs et un total de 21 183 hospitalisations, des chiffres en hausse par rapport aux semaines précédentes. Selon un rapport remis mardi au Conseil de défense, consulté par Les échos (article payé), les patients atteints de Covid-19 pourraient dans ce cas occuper plus de 40 000 lits d’hôpitaux et plus de 9 000 lits de soins intensifs à la mi-novembre. Cependant, ces chiffres sont bien supérieurs aux capacités normales des hôpitaux, qui étaient de 5 080 avant la pandémie et qui s’élevaient à “5 800 lits la semaine dernière et 6 400” en début de semaine et devrait bientôt atteindre les 7000, a déclaré Olivier Véran jeudi.
Pour Philippe Amouyel, spécialiste de santé publique au CHU de Lille, le confinement réduira le nombre d’admissions en réanimation. «Nous avons eu l’expérience lors de la première vague: nous nous sommes rendu compte qu’après trois semaines de confinement, les courbes commençaient à se rompre avec des baisses de 40% d’admissions en soins intensifs en moins, chaque semaine», dit-il sur franceinfo. D’autres pensent que cela ne suffira pas. “Le contexte n’est plus le même aujourd’hui. De nombreux patients non-Covid doivent encore être pris en charge. Nous n’avons pas la même marge de manœuvre qu’au printemps”, s’inquiète Renaud Piarroux.
Face à cette incertitude, le gouvernement procrastine: “Comme les courbes de réanimation et les cas sévères ne sont que le reflet des courbes de contaminations des semaines précédentes, cela nous permettra d’anticiper”, rassure Olivier Véran.
Parce que l’hiver est propice à la contamination
Difficile de modéliser les résultats futurs du confinement actuel sur ceux obtenus au printemps, car plusieurs paramètres diffèrent, notamment les températures. “En avril, il fait sec et chaud. Les mois d’automne, il fait humide, lourd, froid. Ce sont des situations climatiques favorables à la transmission du virus “, a expliqué Olivier Véran.
Dès la fin juillet, le Conseil scientifique a également appelé à la préparation d’une deuxième vague à l’automne. Un rapport publié en juillet par Santé publique France sur la saisonnalité du virus, souligne que “Les coronavirus humains autres que Sars-CoV-2 ont un comportement saisonnier avec une transmission atténuée pendant la saison estivale”. «L’effet à long terme de la saisonnalité dépendra principalement du niveau d’immunité conférée par l’infection par Sars-CoV-2 ou par l’immunité croisée avec d’autres coronavirus», cependant, peut être lu dans le document.
Devant la commission d’enquête sur la gestion de la pandémie à l’Assemblée nationale, le directeur général de la santé Jérôme Salomon a rappelé que “nous avons encore beaucoup d’inconnues sur ce virus”. Il pourtant a noté que les températures et les conditions météorologiques “profondément changé” en Europe deux semaines avant cette nouvelle vague, indique LCI.